
Si le Travail est la norme pour les assignés à résidence dans les camps français, censé couvrir le coup de leur privation de liberté, la mesure s’étend à toute autre forme d’enfermement : Chantiers de la Jeunesse, Compagnies puis Groupes de Travailleurs Étrangers, chantiers de l’Organisation Todt en France. Sans oublier les effectifs de la Relève puis du S.T.O., le travail forcé à l’agriculture via le Secours National, aux usines Renault de Mulsanne (Sarthe), voire les déportations vers les kommandos des camps de concentration du Grand Reich où les hommes fournissaient de la main d’œuvre pour l’effort de guerre allemand. Avec l’historien Peter Gaida, spécialiste du travail forcé en France durant la deuxième Guerre Mondiale nous reviendrons sur le sort des Nomades et Forains au sein de l’O.T. entre 1940 et 1944.



En 1941, la Todt met en œuvre cinq mega-chantiers de U-Boot-Basen (bases sous-marines) pour la Kriegsmarine à Brest, Lorient, Saint-Nazaire, Bordeaux et La Pallice (La Rochelle). Pour assouvir leur besoin de main d’œuvre l’occupant utilise divers moyens de pression : arrêt des travaux publics et transfert de la main-d’œuvre aux chantiers Todt, suppression des allocations-chômage versées à la main-d’œuvre étrangère et française, menace de poursuite devant un tribunal de guerre pour sabotage de la collaboration, etc. Au printemps de 1941, la Todt obtient l’autorisation de recruter des étrangers dans les camps de réfugiés ou dans les baraquements du Commissariat à la lutte contre le chômage. Pas seulement, puisque ces « étrangers de l’intérieur », les Nomades et Forains sont également recrutés. La Todt emploie alors, indirectement donc, environ 60 000 personnes, en principe tous volontaires…
« Parmi les possibilités de sortie, deux étaient réservées aux hommes: l’affectation dans un groupe de travailleurs étrangers ou la mise à disposition de l’Organisation Todt. Dans ce dernier cas, le travail avait lieu le plus souvent sur des chantiers de construction du Mur de l’Atlantique, mais aussi dans des mines et des chantiers forestiers. […] il y avait au moins deux avantages pour un interné d’un camp comme Rivesaltes : la nourriture et les conditions d’hébergement étaient bien meilleures […] Comme dans les autres camps d’internement, une commission d’incorporation est mise en place à l’été 1941, à Perpignan. Sur 272 hommes envoyés devant la commission en juillet 1941, 46 sont des Nomades. […] pour la plupart l’expérience aura été de courte durée : 31 d’entre eux sont ramenés au camp entre septembre et novembre 1941. En fait, on ignore même combien sont effectivement partis en zone occupée pour travailler. »
[Doulut, Alexandre, Les Tsiganes au camp de Rivesaltes (1941-1942), Paris, Lienart, 2014, 160 p., pp 55-56]
19 Juillet 1941. Camp d’Argelès :
Transfert d’un commando d’une cinquantaine hommes à l’Organisation Todt à Brest (Finistère) où l’on construit en 500 jours pour la kriegsmarine la U-Boot base au lieu-dit « les 4 Pompes » sur l’ancienne base d’hydravions, aux pieds de l’École Navale. Les superstructures de la base sont réalisées par les firmes berlinoises Polenski u. Zoellner, ou Julius Berger, la Société Campenon-Bernard. Les journées de travail durent 12 heures avec une pause de 30 minutes pour déjeuner. Le chantier fonctionne en continu avec une équipe de jour et une de nuit. Le soir les hommes sont confinés au camp Saint-Pierre à Brest [?]. Le 13 Septembre 1941, la première tranche de l’U-Bunker est inaugurée. Retour au camp de Rivesaltes, îlot F, le 08 novembre 1941 après cinq mois de travaux forcés. Parmi eux :
François BAUMGARTNER
Joseph BAUMGARTNER
André FURMANN
Aloyse HOFFMANN
Charles HOFFMANN
Matthias HOFFMANN
Nicolas HOFFMANN
Antoine Alti LAFERTIN
Frédéric LAFERTIN
Joseph LAFERTIN
Hermann LAFERTIN Itty
Joseph LAFERTIN Itty
Georges LAURENT
Jacques LOEFFLER 1905
Frédéric MECKES, qui décède au camp de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales), le 23 décembre 1941, âgé de 49 ans…
Joseph MECKES
Pierre MECKES Seiler
François SCHNEIDER
Louis SCHNEIDER
Pierre SCHNEIDER 1890
Pierre SCHNEIDER 1911
Pierre SCHUMACHER
Jean SECULA 1895
Jean SECULA 1926
Frédéric SEILER
Rodolphe WACHTER
Jean WEISS
Joseph WEISS 1876
Joseph WEISS 1917
Albert WINTERSTEIN
A partir du printemps 1942, aux chantiers en cours sur les bases sous-marines, et les aérodromes de la Luftwaffe, la Todt se voit confier la construction de l’Atlantikwall, la fortification du littoral de l’Europe de l’Ouest. La Todt, mandataire du gouvernement du Reich, passait avec des sociétés privées des Leistungvertragen (contrats de rendement). Si elle assurait la maitrise d’œuvre des chantiers, et fournissait Baustoffe (matériaux de construction) et Arbeitskräfte (main-d’œuvre), les entreprises contractantes étant l’employeur, étaient censées régler les salaires. Ce sera la ligne de défense des responsables de l’O.T. devant le tribunal de Nuremberg. Selon Xaver Dorsch : Mit den eingesetzten franz. Baufirmen hat die Organisation Todt im allgemeinen sehr gute Erfahrungen gemacht… (L’Organisation Todt en général a fait de très bonnes expériences avec les entreprises françaises contractantes…) [DORSCH Xaver, O. Todt in Frankreich, p. 80]
27 Mai 1942. Camp de Poitiers.
» Quelques nomades internés à la route de Limoges à Poitiers ont travaillé sur les
[Sources : Roger PICARD : La Vienne dans la guerre 1939-1945, la vie quotidienne sous l’Occupation, Roanne, Horvath, 1984, p. 93. AD Vienne, 104 W 28 : Note du chef de camp, 27 mai 1942 et 104 W 3 : Note du chef de camp, 12 juin 1942. AN, AJ*’ 368 : Rapport mensuel du préfet de Charente-Maritime, 25 juin 1942. AD Vienne, 104 W 3 : Note du chef de camp, 1 janvier 1944. AD Vienne, 104 W 28 : Registre des entrées des internés nomades.]
chantiers de l’organisation Todt à Saintes (Charente-Inférieure), à Neuville-de-Poitou
(Vienne) et dans la carrière de pierres souterraine de Migné-Auxance (Vienne). La carrière de Migné abritait un dépôt de la Kriegsmarine. Le 27 mai 1942, 64 nomades et 86 Juifs
étaient transférés dans le camp de travail de Saintes. Trois internés ont réintégré le camp de
Poitiers le 12 juin 1942. Ces internés travaillaient pour le compte de la Société des
Liaisons Téléphoniques. Ils étaient cantonnés à l’hôtel de la Couronne et gardés par la
gendarmerie. Treize nomades n’ont pas été transférés à Montreuil-Bellay en décembre
1943 ; ils sont restés dans le camp à la disposition des autorités allemandes. Le 11 janvier
1944, ils étaient transférés à Migné-Auxance « * Le 20 février 1944, trois nomades travaillant
à Neuville étaient ramenés à Poitiers. »
Vendredi 05 Juin 1942. André Jeramec (S.S.E. – Service Social aux Étrangers) note de sa visite au camp de Rivesaltes :
[Archives Départementales des Pyrénées-Orientales, FRAD66, 1 W 95 : Commission Todt, inspections : instructions, rapports, correspondance (1940-1942)]« A mon arrivée à Perpignan, je suis accueilli par M. Bartalot [pamé] état des travaux de la commission Todt [… p. 7] Il y aurait au total environ 2 200 hébergés.
D’autre part il y aurait : […p. 8 :] 426 hommes inaptes
50 hommes aptes au travail réservés pour les besoins du camp
36 hommes reconnus aptes à la disposition de la M.O.E.
1 147 femmes, dont 537 aptes au travail
581 enfants au dessous de 15 ans
Il ne resterait en réalité que 7 jeunes gens âgés de 15 à 18 ans parmi lesquels 5 seraient inaptes. […]
3°) que Mr le Colonel de Pelet avait fait le matin même une visite au chef du camp qui paraissait très favorable à l’idée du centre de nomades en voie d’organisation » [Saliers.]
Samedi 18 juillet 1942 : Retour des hommes envoyés à Saintes (Charente) au chantier Todt vers le camps de Poitiers (Haute-Vienne).
Juillet-Août 1942 : Camp d’Arc-et-Senans : 11 Nomades effectuent des travaux forestiers dans le Jura pour la Todt. [AD Doubs, 48 W4, Rapport mensuel, juillet-août 1942 et 59 W 10, IGC, 30 novembre 1942.]

39.Ciments de Champagnole_©Yves Sancey, 1988.jpg
18 octobre 1942 : Joseph LAGRENÉ, interné à Arc-et-Senans (Doubs), est requis pour l’O.T. à Champagnole (Jura). Blessé, il y échappera. [Source : Monique Heddebaut, RHS, p. 210] Entre octobre 1942 et avril 1943, 14 Nomades partent travailler à la cimenterie de Champagnole et 14 autres à la construction de la base de la Kriegsmarine à la Rochelle.
» Selon le chef de camp, les 14 Nomades travaillant à Champagnole revenaient
[Source: M.C. Hubert, Thèse, p. 576. et AD Doubs, 48 W 3, note du chef de camp, 28 avril 1943.]
régulièrement au camp rendre visite à leurs familles. Certains y restaient même quelques
jours. D’autres ont profité de ces séjours pour organiser l’évasion de leur famille. Les autorités
tenaient à garder leur famille au camp pour dissuader ces travailleurs de s’évader. Ce procédé
n’était, en fait, pas très efficace. Sur les 14 nomades partis à Champagnole, 7 se sont
évadés.«
25 novembre 1942. Les 299 Nomades présents à Rivesaltes sont transférés au camp de Saliers. La liste initiale de 321 Nomades à transférer a fondu avec les multiples évasions précédant la fermeture du camp qui sera attribué à la Todt. Sur 148 évadés entre le 13 novembre 1942 et le 23 novembre 1942, 70 sont « Gitans ». [Source: AD Py-O, 38W174, feuille manuscrite, 2 décembre 1942]
27 janvier 1943. François ADOLPH parti définitivement du camp du Vernet d’Ariège à destination de « Travailleur volontaire pour l’Allemagne « .
24 mars 1943. Camp de Saint-Sulpice-la-Pointe (Tarn). Départ de Gaston BAUD et Henry BEAUD sont transférés à la Todt Bayonne dans le cadre du S.T.O., le premier s’évadera.
[Sources : FRAD065, 20 W 45, 1943/03/30, liste des internés du camp de Saint-Sulpice transférés à Bayonne pour le service obligatoire du travail le 24 mars 1943. FRAD065, 20 W 18, Préfecture des Hautes-Pyrénées, Cabinet du préfet.]
« Les Nomades requis pour l’organisation Todt étaient dirigés sur la caserne
Lecourbe à Besançon avant d’être dispatchés sur plusieurs sites. Le 5 juillet 1943, 6
nomades quittaient le camp pour Champagnole. Le départ de 5 Nomades pour la Rochelle
entre le 19 et le 27 juillet provoqua aux dires du chef de camp « beaucoup
d’effervescence »,. Le 2 août 1943, 3 Nomades partaient à Champagnole comme
« volontaires ». En réalité, ces 3 nomades ont été désignés comme volontaires par le directeur
de l’organisation Todt qui visita le camp le 27 juillet. Le 23 août, 10 autres Nomades
étaient dirigés sur Champagnole. En août 1943, 17 Nomades travaillaient à Champagnole et 5
à la Rochelle. Pour dissuader les Nomades de s’évader, les autorités allemandes ont adressé à ceux qui avaient quitté irrégulièrement leur lieu de travail pour se rendre au camp
d’internement des lettres comminatoires sous pli recommandé leur enjoignant de rejoindre
leur lieu de travail.
Tous les moyens étaient bons pour recruter des travailleurs forcés. Le 21 octobre
1943, les gendarmes ont extrait le nomade Georges W. de la maison d’arrêt de Besançon pour
le conduire à Champagnole.
Tous les nomades requis pour l’organisation Todt ne partaient pas travailler. Sur
les 17 nomades conduits à Besançon en avril 1943, 4 sont effectivement partis. Il s’agissait de
Charles C. 30 ans, Edouard L. 18 ans, Joseph R. 53 ans et Joseph R. 27 ans. Ces quatre
hommes s’étaient déjà évadés d’un camp de l’organisation à la Rochelle le 13 février 1943. Les
13 autres nomades ont été ramenés au camp le 13 avril 1943. Soixante-cinq nomades
internés à Arc-et-Senans ont été incorporés dans l’organisation Todt.»[Sources: AN, 72 AJ 119, A 1 16, Noite du chef de camp, 16 août 1943; AD Doubs, 48 W 4, Rapport mensuel, juillet 1943; AD Doubs, 48 X 4, Correspondance entre le chef de camp et le préfet du Doubs, 2 août 1943 ; AD Doubs, 48 W 4: Note du chef de camp, 21 octobre 1943 ; AD Doubs, 48 W 4 : Correspondance entre le chef de camp et le préfet du Doubs, 14 avril 1943.]
Décembre 1943 : Un commando de 5 Nomades venus du camp des Alliers-Angoulême (Charente) aurait été envoyé travailler à la Todt sur l’Atlantikwall sur l’île d’Oléron à la défense de la pointe de Chassiron et 4 personnes à la Todt à Bayonne (Eskual Herria / Pays Basque).
[Source: Calonec, Clairière, n°52, juin 1999]





12 décembre 1943
Camp de Nexon : Transfert de 70 personnes dont au moins 25 Nomades sous contrôle de l’Organisation Todt à la citadelle de Saint-Martin de Ré, sur l’ile de Ré (Charente-Maritime), La Rochelle ayant été bombardée. Depuis 1941 le « Centre de Séjour Surveillé » est sous administration allemande de l’O.T. Ces hommes ont d’abord été considérés comme « volontaires » pour le S.T.O., puis envoyés à l’O.T. parmi 800 personnes environ à 95% françaises, politiques, droits communs et internés administratifs, au « Camp de Travailleurs Surveillés ». Fin 1943, l’échec d’une « livraison » d’hommes à l’O.T. décrétée par Pierre Laval, entraine la réquisition pure et simple des hommes par les autorités d’occupation sur la base de l’article 52 de la Convention de La Haye (1907) qui permet que des hommes soient recrutés pour l’armée d’occupation s’ils ne prennent pas part aux combats contre la France ou que les fortifications construites ne sont pas tournées contre leur pays. Ils sont affectés aux travaux de défense côtière de l’île. Ils se rendent au travail sous escorte armée. En 1944, ce camp est situé à l’intérieur de la citadelle, dans l’ancien centre pénitentiaire, maison centrale fortifiée, entourée d’un mur très large et de fossés profonds. Des postes de guet sont disposés sur le chemin de ronde. La garde est assurée jour et nuit par 23 G.M.R. (Groupes Mobiles de Réserve, force française), des anciens L.V.F. (Légion des Volontaires Français contre le bolchévisme), et le renfort de gendarmes français, sous les ordres de 2 gardiens allemands des S.K. (Schutz Kommandos, le service de protection de l’O.T.). Les prisonniers gardent leurs vêtements civils. Ils ont un matricule. La nourriture est mauvaise. Le 02 janvier 1944 les prisonniers politiques écrivent à un prêtre qui note :
« exposant la pénurie de nourriture à laquelle ils sont soumis et rappelant que sur les cinq cents hommes qui forment l’effectif du camp, à part les cent droits communs […] il n’ y a que de bons français patriotes, qui n’ont qu’un seul objectif, servir au mieux les intérêts du pays et qui lancent un appel à l’aide pour ne pas mourir de faim. »
[Sources: AFMD et AJPN, consultés le 12/12/2024.]
Ils étaient dans la catégorie la plus basse des Zwangsarbeiter (travailleurs forcés), enfants, vieillards, hommes, femmes de toutes nationalités. Les besognes manuelles les plus pénibles et les plus dangereuses leurs sont réservées. Aucune sortie du camp. Pas de vêtement. Soixante heure de travail hebdomadaire, de jour comme de nuit, ils ne bénéficient pas du repos dominical consacré au nettoyage du personnel et des locaux. Ils sont classés dans la catégorie des Untermenschen (sous-hommes). Cela confirme le témoignage de Pierre Inderchit qui parlait de son passage à Saint-Martin-de-Ré comme la pire épreuve subie durant son parcours d’interné, en sortant à moitié fou… Les derniers internés administratifs seront libérés, suite aux accords franco-allemands en novembre 1944 (liste de 169 internés élargis à la date du 7 décembre 1944 suite à l’arrêté du préfet).
Parmi eux :
Jean CAPELOT
Adolphe-Mayer « Nounou » DUVILLE
Bernard ERNWEIN
Jean-Baptiste FOURMANN
Rodolphe GIDEMANN
François HORNBERGER
Michel HORNBERGER
Joseph HUBER
Reinhold KRAEMER
Florent MEINHARDT
Hugo MEINHARDT
Auguste MULLER
Fernand WEISS
Séraphin WEISS
Victor-Paul WEISS
Joseph WINTERSTEIN
A partir de 1944, les entreprises françaises traitent directement avec l’O.T. sans l’intermédiaire de firmes allemandes. La Commission consultative des dommages et réparations, crée en octobre 1944, estimera leur nombre à 1 500. La dissolution voulue par Berlin des Chantiers de Jeunesse entraine le versement d’une partie des 30 000 jeunes vers l’O.T.
12 janvier 1944
Joseph COLOMBAR, interné au Camp de Noé, est détaché à l’Organisation Todt
Mars 1944.
« Dans les archives incomplètes du camp de Rennes, on ne trouve la trace que d’un
[M.C. Hubert, op. cité, p. 577. et AD Ille-et-Vilaine, 134 W 18, 23 mars 1944]
seul nomade incorporé dans l’organisation Todt. La date d’incorporation est inconnue mais le
dossier de libération de sa femme, libération qui a été refusée, révèle que cet homme
travaillait toujours pour les Alemands en mars 1944.“
27 mai 1944. François ADOLPH serait parti définitivement du camp du camp du Vernet d’Ariège à destination « organisation TODT » Cherbourg (Manche)… mais la citadelle de cette dernière avait été prise par l’armée américaine en janvier 1944…
Camp de Jargeau (Loiret). 25 Nomades sont réquisitionnés pour travailler sur les chantiers de l’Atlantique à Lorient et dans les cimenteries de Champagnole (Jura). [Pascal VION, Le Camp d’internement de Jargeau 1940-1945, mémoire de Maîtrise, Orléans, 1988, p. 59.
Enfin, 3 Nomades ou Zigeuner auraient été utilisé dans l’un des camps de concentration d’Alderney (îles anglo-normandes. [Source : Adolf Island, Manchester University Press]
Ceux de Saliers
34 hommes passés par Saliers ont été sélectionnés pour l’Organisation TODT, et envoyés en Zone Occupée travailler sur les défenses de l’Atlantikwall :
Camp de départ | O.T. | Date entrée | Date sortie | Effectif |
Argelès | Brest | 07/18/41 | 11/08/41 | 18 |
Le Vernet | Cherbourg | 05/07/44 | 1 | |
Nexon | La Rochelle-Laleu | 12/12/43 | 06/30/44 | 16 |
Saint-Martin-de-Ré | La Rochelle | 06/22/44 | 06/30/44 | 2 |
Le différentiel s’explique par des passages dans 2 voire 3 OBL (Oberbauleitung, direction supérieure de construction, l’échelon de base de l’O.T. sur le littoral) par certains internés
Ils représentent 5,13% de la population globale de Saliers-Arles. Ce sont bien sûr tous des hommes, entre 15 et 56 ans, majoritairement originaires du Nord-Est et de l’Ouest de la France. Ce sont 3 adolescents (J3), 12 Adultes, 1 Cultivateur, et 17 Travailleurs de force qui sont assignés à un chantier, où ils restent quelques mois le temps de sa réalisation. Ils sont bûcherons, forains, journaliers, maçons, manœuvres, mineurs, ouvriers agricoles, ouvriers du bâtiments, soudeurs, tailleurs de pierre, ou vanniers.
Le premier contingent à partir d’Argelès-sur-Mer vient majoritairement d’Alsace-Moselle, dont ils soit réfugiés en septembre 1939, soit expulsés entre juin 1940 et février 1941. Nombreux sont passés par le Centre d’Accueil de Thonon-les-Bains en Haute-Savoie, quelques-un au camp de concentration d’Agde (Hérault), avant d’arriver aux camps de Rivesaltes et d’Argelès, en majorité début 1941. Manouches ou jenish, elles possèdent des interconnexions familiales. 8 hommes, qui n’avaient pas été mobilisés en vertu des lois militaires qui excluaient un père de famille nombreuse (plus de 5 enfants) de la conscription, se sont quand même vus jugés « apte » au travail forcé au sein de l’organisation. Tous sont Français et catholiques, mais dits « de race : nomade ».
Les organismes sont soumis à rude épreuve. C’est notamment le cas de Pierre MECKES, 48 ans lors de son départ à la Todt et qui, après des internements dans plusieurs camps, et de multiples tentatives d’évasions, décède deux ans plus tard, et trois jours après sa libération du camp de Saliers-Arles à quelques kilomètres de là, à Montélimar (Drôme). Il avait 50 ans.

Fritz Todt, ingénieur allemand (1891-1942)
Nazi convaincu depuis 1922, membre du N.S.D.A.P., il donne son nom à l’organisation du même nom en 1938. Le 17 mars 1940 il est nommé ministre impérial pour l’armement et Les munitions (Reichsminister für Bewaffnung und Munition). Dès l’occupation de la France il entame la construction des U-Boot-Basen (bases sous-marines). En Février 1942 il décède dans un accident d’avion. Dès le printemps 1942 débute la construction de l’Atlantikwall, censé empêcher un débarquement allié à l’ouest. Albert SPEER, ministre de l’Armement et des Munitions, lui succède à la tête de l’O.T. et poursuit la construction de l’Atlantikwall dont il délègue la réalisation exécutive à Xaver DORSCH à Berlin.
Sources
Archives Nationales, Série F/7/15096 dossier 4b Camps de travailleurs surveillés à La Rochelle (Laleu) à La Tremblade (La Coubre) et à Saint-Martin-de-Ré Administration générale : correspondance (janvier-juin 1944), rapport bimestriel du directeur des camps (juin 1944).
Archives Départementales de l’Aude, 99 W 384: S.T.O., Agence Todt à Perpignan, Agde et Rivesaltes, travailleurs permissionnaires affectés spéciaux (1943-1944)99 W 384: S.T.O., Agence Todt à Perpignan, Agde et Rivesaltes, travailleurs permissionnaires affectés spéciaux (1943-1944)
Archives Départementales des Bouches du Rhône, 76 W 210, Relève, réquisitions, documents divers, organisation TODT, 1942-1946)
78 W 411, Organisation de la région de Marseille ; organisation des services allemands; O.K.H.; organisation TODT […], 1939-1945.
142 W 1 Circulaires et instructions générales 1941-1945, 228. Situation des internés envoyés en Allemagne ou à la Todt, 12 juin 1944.
Archives Départementales de Charente, S. C. 13, N 591-593 « Il existe un dossier concernant l’internement des Nomades au camp des Alliers à Angoulême portant sur les années 1940 et 1941 et contenant des listes nominatives, des rapports et des demandes de circulation en ville. »11Hubert, Marie-Christine, Thèse, p. 885.
Archives Départementales du Maine-et-Loire, FRAD049, 24 W 65, Lettre du préfet du Finistère au préfet du Maine-et-Loire, 1er Mai 1942
Archives Départementales des Pyrénées-Orientales, FRAD66, 1 W 95 : Commission Todt, inspections : instructions, rapports, correspondance (1940-1942)
62 W 123 : Travailleurs étrangers envoyés dans l’organisation Todt : listes nominatives ; entreprises du département : recensement, statistiques ; commission de contrôle de la main d’œuvre : listes. (1943-1944)
Archives Départementales de Haute-Vienne, FRAD087, Fonds de la Direction Régionale des Renseignements Généraux : TT1 Camp de Nexon-fiches d’internés (1942-1944) (1621 W 10-11-12), Organisation Todt liste nominative d’internés à Nexon-1943 (1621 W 58)
Bibliographie
CHAVANDIER Christian, et Daumas Jean-Claude (dir.), Travailler dans les entreprises sous l’Occupation, Besançon, Presses Universitaires de Franche-Comté, 2007. Dont : Desquennes Rémy, « Les camps de travail de l´Organisation Todt en France 1940-1944″p. 235-256 ; Gaida Peter, « Les camps de travail de l’Organisation Todt en France » ; Lemmes Fabian « Les Conditions de travail dans les entreprises françaises du bâtiment et des travaux publics enrôlées dans l’Organisation Todt », p. 229.
DESQUENNES Rémy, « L’Organisation Todt en France (1940-1944) », in. Histoire, économie et société, 1992, n° 3.
DUBERNAT Jean-Guy. Organisation Todt, au cœur de la collaboration. Ed. Ouest France, 2014, br. 11€
GAIDA Peter, L’Organisation Todt en France, Lulu, 2016, collection LLB.SCIENC.HUM., 144 pages.
HUBERT Marie-Christine, Les Tsiganes en France 1939-1946, Assignation à résidence, Internement, Déportation, Thèse de Doctorat, Paris X Nanterre, 1997. Tome III, chapitre V Main d’œuvre au service de l’Allemagne, « L’organisation Todt », pp. 575-578.
HUSSER Beate, Histoire du camp militaire Joffre de Rivesaltes, Paris, Lienart, 2014, 88 p. [Descriptif Îlot F, p. 29 ; Rapport Dr Lefevre Février 1941, p. 31 ; Rapport inspecteur train du Levant, pp. 31-32 ; Tempête Janvier 1941, pp. 32, 39 ; O.T./Todt, p. 48.]