Au temps de la peste… et du choléra.

L’expression « être traité comme un pestiféré » vous évoque quelque chose ? Nos recherches nous ont amené à croiser la route des Voyageurs de l’ancien temps, souvent assimilés aux vagabonds, depuis la Grande peste européenne de 1437 jusqu’à la peste de 1720, puis le choléra de 1865. Petit survol historique dans la région d’Arles-Marseille.

« Vue du Cours pendant le peste de 1720 », peinture de Michel Serre à voir au Musée des Beaux-Arts de Marseille

« Au milieu du XVIe siècle, sous le coup de la crise sociale provoquée à travers tout l’Occident par la Peste Noire, on condamne l’oisiveté et on pourchasse les vagabonds. »1 En période d’épidémie, villes et villages se referment.

De 1578 à 1580, Arles est touchée par les crues du Rhône qui provoquent des inondations dans un pays marécageux ; mais surtout de 1579 à 1581, la ville est frappée par la Grande Peste, qui entraîne la prise de mesures sévères pour limiter les circulations urbi et orbi dans les deux sens. Étrangers, journaliers, vagabonds, pauvres sont concernés, et implicitement les Bohémiens. Les consuls « Doibvent chasser tous estrangers, vacabons et gentz sans adveu. »2 Mais en ménageant les « pouvres », car « Si ne le faisons, Dieu n’aura pas pitié de nous. »3

En 1629, nouvelle épidémie de peste à Arles. Parmi de nombreuses mesures le Parlement d’Aix enjoint à « Tous Vagabonds & Gens fans aveu & métier fortiront hors des Villes & Lieux ; Et enjoint aux Hôtes & Cabaretiers de les reveler, & aux Intendans, à peine du Foüet & de la Galere. »4 L’épidémie de peste aurait fait deux millions de victimes en France.

25 mai 1720. Arrivée de la peste à Marseille, amenée de Syrie par un navire marchand. Les forçats des galères sont utilisés « pour fervir de corbeaux […] aufquels ont promis la liberté » et qui « moururent prefque tous de la Pefte deux jours après. »5 La ville est complètement coupée du reste du pays. Il y a 120 000 victimes. Parmi elles, nombre de femmes « bohémes » qui étaient recueillies à l’hôpital des galères. Il y a plus de 8 000 morts en Arles.

En Août 1720 à Brignoles (Var), des « bouemes » sont arrêtés par la maréchaussée qui les abandonne presque aussitôt en pleine campagne. Les consuls (les ancêtres du conseil municipal) les font de nouveau arrêter et garder par quatre hommes. Ils sont ensuite conduits, enfermés et surveillés dans le château de Flassans, à la porte duquel on fait poser une serrure du coût de 7 livres 14 sous. Pour leur conduite et surveillance la commune dépense 97 livres 4 sous.6


Peu après la terrible épidémie de choléra qui à partir du 22 juillet 1865, ravagea Marseille dura 166 jours, et fit 2037 victimes, on prit un certains nombres de mesures, parfois inutiles, pour se protéger des épidémies (on n’isolera le vibrion du choléra qu’en 1884, et ce n’est qu’avec le Docteur Semmelweis au XXe siècle que la médecine adoptera de façon généralisée le lavage des mains comme mesure prophylactique, qui prévient la maladie.) Parmi celles-ci, et en partie pour cette raison, on n’oublie pas « les bohémiens et autres individus nomades sans profession avouée » en prenant le 22 septembre 1866 un arrêté de police générale contre eux.


Voyageurs, quels sont vos droits aujourd’hui ?

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Sources

1 Geremek, Op. cité, p. 75.

2 Louis Borel, Ordre tenu en la ville d’Arles du temps de la dernière contagion qui peust en l’année 1579, 80 et 81. Suivant ce qu’en a écrit Louys Borel, bourgeois, consul de ladite ville, in. Félix Reynaud, La Grande Peste à Arles (1579-1581), Marseille, Marius Olive, 1880, 36 p., p. 19.

3 Félix Reynaud, La Grande Peste à Arles (1579-1581), p. 19.

4 Arrest de la cour de Parlement tenant la chambre de vacations Contenant Reglement fur lez fait de la Pefte. Du 17 Juillet 1629. Aix, Joseph David, 1720, 27 p., Art. XXI, p. 7. in. Recueil factice [BMVR 3611, f°. 181-194.] Voir aussi XXIV, peines prévues pour les gueux et les gardes.

5 Martin, Histoire de la dernière peste de Marseille, Aix, Arles, et Toulon, Paris, Paulus-Mesnil, 1732, 392 p., p. 55. [BM Marseille, Fonds Patrimoniaux, 4693].

6 AC Brignoles, BB 51, fol. 955, CC 29, fol. 924, 929 v°.

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