Matéo MAXIMOFF (1917 † 1999)

Mateo enfant, en famille en 1924 (A droite sur l’image)

Matéo MAXIMOFF, écrivain rom kalderash (1917 † 1999)

Né à Barcelone (Catalogne), le 17 janvier 1917, fils de Grégoire Lolia Maximoff, rrom de Russie et d’une mère manouche française, Elisa Pavlena RENARD.

Le 6 septembre 1938, Matéo, qui est devenu orphelin, rend visite à sa famille maternelle à Charbonnier-les Mines (Puy-de-Dôme). Là, il se trouve pris au cœur d’une échauffourée familiale très violente faisant trois morts, et passe trois mois et demi en prison en préventive (jusqu’à un non-lieu).

« Les Roms qui ignoraient tout de ce qui se passait alors en Europe ne pouvaient ni savoir ni comprendre que toute cette foule ne venait pas seulement de Paris, mais aussi de toute la France et même de toute l’Europe; tous ces gens fuyaient devant le danger du nazisme. Sur toutes les routes de France, en se déplaçant vers le Sud, vers l’Espagne, on côtoyait toutes les races de la terre, mais surtout des Juifs en provenance des Balkans et de la Baltique. […] Le rendez-vous de tous les Roms était la ville de Bordeaux. » (Dites-le avec des pleurs, p.103.)

Il est interné avec toute sa famille au camp de Gurs (Hautes-Pyrénées) du 17 juin au 8 août 1940 (42 jhours) au motif d’être russes. Une baraque est réservée à une cinquantaine de Nomades. Les hommes sont séparés des femmes et enfants. « Chaque matin, on nous donnait un peu de café au lait dans lequel, il y avait beaucoup, beaucoup trop d’eau. On pouvait dire de la nourriture qu’elle était presque infecte. Rien n’était bon : du riz épais ou des haricots et des pois-chiches. Du carpaccio espagnol. Mais il fallait bien manger. »1 A leur libération ce même mois ils sont assignés à résidence à Tarbes (Hautes-Pyrénées) avec autorisation d’excercer leur commerce ambulant et de circuler dans tout le département et adjacents.2 « Nous vivions à Tarbes de la même façon qu’avant la guerre. […] Le matériel commençait à manquer partout. Les cartes de ravitaillement avaient été mises en service. L’essence manquait. C’était la guerre. Mais nous, je peux le dire, nous étions bien. Nous n’avions rien à nous reprocher, nous commencions à avoir des nouvelles de nos familles qui se trouvaient en zone occupée, et même à l’étranger. Nous continuions notre travail et nous nous étions fait quelques amis au commissariat, à la gendarmerie et même à la Préfecture. Nous avons ainsi obtenu facilement des papiers de circulation dans le département où nous habitions, et même dans les départements limitrophes. De cette façon, nous pouvions nous déplacer dans toutes les Pyrénées ; nous pouvions aller seul ou à plusieurs pour exercer notre commerce, étamage, réparation du cuir, etc. »3

Notes

1 MAXIMOFF, Matéo, Routes sans roulotte, Matéo Maximoff ed., 1993, p. 60.

2 MAXIMOFF, Matéo, Dites-le avec des pleurs, Matéo Maximoff ed., 1990, p. 148.

3MAXIMOFF, Matéo, Routes sans roulotte, Matéo Maximoff ed., 1993, p. 99.

1er avril 1941 : Tous les nomades circulant dans les Hautes-Pyrénées sont raflés par les gendarmes et internés au camp de Lannemezan. « Dans certains camions, il y avait des Manouches qui avaient été ramassés un peu partout dans la région. »1 Matéo Maximoff est de ceux-là. Environ 400 personnes se retrouvent au camp dans des tentes sur un plateau battu par les vents gardés par 29 gendarmes, sans barbelé, avec autorisation de sortir le matin. « Tous les matins, vers midi, midi et demi, les gendarmes attendaient que tous les nomades, comme il nous appelaient, soient rentrés, sauf le mercredi, jour de marché, y compris le dimanche ; deux gendarmes venaient au camp avec la liste de ceux qu’ils appelaient aussi les internés, et ils faisaient l’appel. Il ne fallait pas avoir une absence injustifiée (…) Si un membre adulte manquait à l’appel et s’il était incapable de justifier de son absence, on le mettait en prison dès qu’il était retrouvé. »2 En général battu, puis jugé et condamné à une amende de 80 francs.3

1 Maximoff Matéo, Routes sans roulotte, Matéo Maximoff ed., 1993, p. 103.

2 MAXIMOFF, Matéo, Routes sans roulotte, Matéo Maximoff ed., 1993, p. 107.

3 HUBERT, Marie-Christine,Thèse, p. 121, entretien avec Matéo Maximoff, 31/01/1996.

Il est connu pour être l’auteur du Prix de la liberté, et pour son engagement dès le premier congrès à Londres en 1971 auprès de l’Union Romani Internationale, qui institua le terme Rrom en lieu et place de nombreux exonymes péjoratifs voire injurieux (Tsiganes, sous ses différentes graphies, Romanichels, Rabouins, etc.), un drapeau et un hymne transnationaux.

Il décède à Romainville (Seine-Saint-Denis) le 24 novembre 1999.

Sa fille Nouka, née d’un second mariage veille à son héritage intellectuel. Ses archives ont été déposées à la médiathèque du même nom à Paris, qui lui a par la suite consacré une exposition.


Parcours géographique


Documents d’état-civil et de police


Documents d’internement


Bibliographie

  • Les Ursitory écrit en 1938, publié en 1946 (Flammarion)
  • Savina (Wallâda) une farouche histoire de femmes (Flammarion, 1957) (ASIN B0000DOHIF) (ISBN 978-2904201073)
  • La Septième fille (Concordia 1969) une histoire de sorcellerie dans le camp d’internement de Lannemezan
  • Condamné à survivre (Concordia 1984) une histoire de vengeance dans l’Europe secouée par les guerres.
  • La poupée de Maméliga (Concordia 1986) les histoires épouvantables que se racontent les Rroms au cours des veillées.
  • Vinguerka (Concordia 1987) Le destin tragique d’une petite danseuse rrom dans les Balkans au XIXe siècle.
  • Dites-le avec des pleurs (Concordia 1990) roman à caractère autobiographique
  • Ce monde qui n’est pas le mien (Concordia 1992) Les aventures d’un enfant Rrom entre la Russie, les Balkans, la France, l’Angleterre…
  • Routes sans roulottes (Concordia 1993) Récit autobiographique
  • Les Gens du Voyage (Concordia 1995) photographique (noir et blanc)
  • E nevi vastia (Pierrefitte : Société Biblique Française, 1995) Le nouveau testament traduit en kalderach.
  • Le prix de la liberté (Wallâda 1996) (ISBN 9782904201226)
  • Les Anges du destin Texte de Matéo Maximoff, photos de Claude et Marie-josé Carret (Filigranes, 1999) (ISBN 2910682234
  • Entretien avec Mateo Maximoff, Paris, 1983, Etudes Tsiganes, n°13

Sources