Camp de la Mauditière, route de Meslay à Grez-en-Bouère (Mayenne) 1940-1942

Le camp ouvre en octobre 1940 pour y accueillir les populations dites Nomades.

15 personnes y sont d’abord internées, circassiennes (KISSLING), foraines (RIEFFEL), et Nomades (BOUTHIER, DEBARD, DUVILLE, JOLIVET, NUPIED, WENGER).

26 octobre 1940, la préfecture prévient le maire de Grez que sa commune est choisie pour y rassembler les Nomades du département. Les deux premiers arrivent le 28.

06 novembre 1940. L’inspecteur départemental de l’hygiène note :

« Cette carrière de la Mauditière est séparée en deux parties réunies entre elles par un tunnel de 12 m de long. L’une, au nord, est envahie par l’eau. L’autre, en contrebas, renferme un étang. Il existe bien une bande de terrain pour mettre les caravanes, mais, trop étroite, elle est dangereuse. De plus, il ne faut pas y installer les nomades qui pollueraient l’eau qu’utilisent les habitants de deux fermes voisines comme eau potable. »

09 novembre 1940. Le camp de Grez prend l’appellation de « Camp de la Mauditière, route de Meslay à Grez-en-Bouère ».

11 novembre 1940, un rapport de gendarmerie signale que « presque tous les nomades ont des roulottes. Toutefois, il en est qui ne possèdent aucun abri. Ainsi, huit personnes sont logées provisoirement dans des granges situées à proximité. »

13 novembre 1940, maire de Grez au préfet :

« Les nomades sont, en ce moment, sans moyens d’existence, n’ayant pas d’argent pour se procurer des vivres et du chauffage. Jusqu’à hier soir, personne pour garder ces indésirables qui démolissent ce qu’ils trouvent, pour se chauffer surtout. La gendarmerie n’a reçu aucun ordre pour les consignes à donner aux gardes. Comment les garder la nuit ? Sinon, ils partiront en maraudeurs. Il faut quelqu’un pour s’en occuper spécialement. » 

16 novembre 1940, maire de Grez au préfet : les hommes destinés à la surveillance sont sur place : des chômeurs mis à la disposition d’un ex-gendarme en retraite.

21 novembre 1940, maire de Grez au préfet :

 » J’ai l’honneur de vous signaler à nouveau le dénuement des nomades. Certains d’entre eux n’ont pas de roulotte pour coucher, pas d’argent pour manger, c’est lamentable. Malgré leur déficience sociale, ce sont tout de même des êtres humains. » 

Et il ajoute qu’il va saisir les autorités d’occupation. Ce à quoi le préfet s’empresse de répondre:

« […] J’ajoute cependant que vous devez vous abstenir de vous adresser à la Feldkommandantur. Il est préférable, en effet, que les difficultés éprouvées par le Maire et le Préfet, comme conséquences d’une pénible occupation, ne soient pas soumises à l’arbitrage d’ailleurs inopérant des occupants. Une autre attitude serait contraire à la dignité française, ainsi qu’aux instructions du gouvernement et à celles que j’ai moi-même données aux Maires du département. » 

Le camp de Grez-en-Bouère est supprimé au cours de la semaine qui suit, et les internés sont transférés bdans celui de la Chauvinerie à Montsûrs, à une trentaine de kilomètres au nord du département.

Jean BURVILLE : « Ma famille et moi avions été arrêtés à Grez-en-Bouère, en Mayenne. Les Allemands n’étaient même pas arrivés que nous étions déjà pris. Nous avons passés dix-huit mois dans le camp de Montsûr (Mayenne), puis ici à Montreuil-Bellay. A Méron [Montreuil-Bellay] il y avait mes deux parents et sept enfants.« 

Il cesse toute activité en février 1942.

Suites au raffles dans l’Aisne, le sous-préfet d’Avesnes-sur-Helpe, le 22 septembre 1943, note que  « le nécessaire est fait dans l’Aisne pour que les intéressés soient dirigés sur la Mayenne », c’est-à-dire probablement sur le camp de Montsûrs.

Rien n’indique son existence localement. A Laval, une stèle pour rappeler l’histoire des Nomades du département indique « Souvenons-nous des hommes, femmes, enfants tsiganes victimes d’une détention arbitraire de novembre 1940 à février 1942 dans les camps d’internement de Grez-en-Bouère et Montsûrs. » a été inaugurée le 18 juillet 1993.


Sources

Archives départementales de la Mayenne, FRAD053, 265 W 175.

Archives départementales du Nord, FRAD0, 1 W 3088, sous-préfet d’Avesnes-sur-Helpe, 22 septembre 1943.

Interview de Jean BURVILLE au Courrier de l’Ouest, octobre 2016.

SIGOT Jacques, « Les Camps », in. Études tsiganes n°2/1995, vol 6.